Actualités

Régime de la responsabilité des produits défectueux et dommages

Contrairement à ce que prévoit la directive européenne, le régime français de la responsabilité du fait des produits défectueux s’applique également aux dommages causés à un bien destiné à l’usage professionnel.

La Cour de cassation a confirmé ce principe dans un arrêt du 14 novembre 2018.

Cour de cass. 1ère chambre civile 14-11-2018 n° 17-23.668

Les délais de paiement du droit français et le contrat de vente internationale

En droit français, les délais de paiement entre professionnels sont régis par l’article L. 441-6 du Code de commerce. Les délais de règlement peuvent être fixés conventionnellement jusqu’à 45 jours fin de mois ou 60 jours à compter de la date d’émission de la facture.

Le non-respect de ces règles peut donner lieu à une amende administrative (de 75 000 € par une personne physique) pouvant aller jusqu’à deux millions d’euros pour une personne morale.

Ces délais – qui sont d’ordre public – peuvent être très contraignants pour les parties à un contrat international, soumis conventionnellement à la loi française.

La question se pose alors régulièrement de savoir comment déroger à ces règles sur les délais de paiement tout en soumettant le reste du contrat au droit français.

La Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandise laisse toute latitude aux parties de déterminer librement les délais de paiement.

Dans un avis n° 16-12 du 24 juin 2016, la CEPC a indiqué que les contrats de vente internationale de marchandises relevant de la Convention de Vienne n’étaient pas soumis au plafond des délais de paiement de l’article L. 441-6, I, al. 9 du Code de commerce, sous réserve, cependant, que les délais de paiement convenus entre les parties ne constituent pas un abus manifeste à l’égard du créancier, par rapport aux pratiques et usages commerciaux.

Cependant, soumettre l’exécution et l’interprétation d’un contrat aux seules dispositions de la Convention de Vienne sur la vente internationale de marchandises peut être source de grandes incertitudes en cas de litige.

Aussi, l’idée est apparue de soumettre uniquement les dispositions relatives aux délais de paiement à la Convention de Vienne et d’exclure son application pour toutes les autres dispositions du contrat.

L’article 6 de la Convention de Vienne distingue 2 possibilités : soit une exclusion totale soit une exclusion partielle des dispositions de la Convention. Les parties peuvent donc se soustraire à telle ou telle disposition de la Convention, mais encore faut-il que cette volonté soit clairement exprimée.

La doctrine s’accorde à dire que la Convention de Vienne tombe sous le coup du régime de « opting out » : la convention s’applique en cas de silence c’est à dire sauf clause expresse d’exclusion. Il faut donc pour que la Convention de Vienne ne s’applique pas, que les parties aient exclu expressément cette possibilité (en désignant le droit applicable au contrat, par exemple).

Concernant l’exclusion partielle de la Convention de Vienne, les parties ne peuvent, cependant, déroger conventionnellement aux dispositions des articles 89 à 101 de la Convention, qui s’appliqueront de droit.

Ces articles sont des dispositions protocolaires, relatives aux :

  • Modalités d’ouverture à la signature de la convention
  • Modalités d’application et d’entrée en vigueur de la Convention
  • Possibilité pour les Etats signataires de soumettre tout ou partie de leur territoire à la Convention
  • Articulation de la Convention avec un autre instrument
  • Possibilité pour les Etats signataires d’émettre des réserves sur des dispositions de la Convention, et la faculté de voir certaines parties de la Convention ne pas leur être appliquées.

Dans le cas où les parties choisiraient de ne soumettre que certaines dispositions de leur contrat à la Convention de Vienne (par exemple les délais de paiement), elles devront prendre en compte l’impossibilité de déroger à certaines dispositions de la Convention et en étudier les implications pratiques.

Fabienne DARBIN-LANGE, Avocat au barreau de Toulouse

Alexandra ONANA, Etudiante en Master de Droit Européen

Rupture des relations commerciales et durée du préavis (le nouvel article L.442.1 du Code de commerce)

L’ordonnance n° 2019-359 du 24 avril 2019, pris en application de la loi EGALIM du 30.10.2018, réorganise et réécrit l’article L.442-6(ancien) du Code de commerce qui régissait jusqu’alors les pratiques restrictives de concurrence.

Les nouvelles règles de l’article L. 442-1 du Code de commerce recentre la liste des pratiques restrictives autour de celles faisant l’objet de l’essentiel du contentieux en la matière, à savoir : – l’obtention d’un avantage sans contrepartie ou manifestement disproportionné (L. 442-1 I-1°), le déséquilibre significatif (L. 442-1 I-2°), et la rupture brutale de la relation commerciale établie (L. 442-2 II), avec en nouveauté, la fixation d’un plafond pour la durée du préavis à respecter.

 

Concernant les modalités de rupture de la relation commerciale établie, le principe est qu’une relation commerciale ne peut être rompue brutalement, même partiellement, et ce, sans un préavis écrit tenant compte de la durée de ladite relation commerciale.

La jurisprudence a précisé que l’évaluation de la durée du préavis à accorder devait être appréciée en fonction de diverses modalités (CA Paris, 13 septembre 2017, n° 14/23934) :

  • Ancienneté des relations ;
  • Volume d’affaires réalisé ;
  • Secteur d’affaires concerné ;
  • État de dépendance économique du partenaire victime de la rupture ;
  • Dépenses non récupérables engagées par la victime de la rupture ;
  • Temps nécessaire pour retrouver un partenaire.

Si, au regard de la jurisprudence en la matière, les juges fixaient en moyenne la durée du préavis à un mois par année de relation, il existait – cependant – une forte variabilité des préavis pour une même ancienneté en fonction des situations, des usages ou des textes de loi spécifiques.

Le nouvel article L.442-1 (II) du Code de commerce instaure un plafond de la durée de préavis à respecter en cas de rupture des relations commerciales établie : « En cas de litige entre les parties sur la durée du préavis, la responsabilité de l’auteur de la rupture ne peut être engagée du chef d’une durée insuffisante dès lors qu’il a respecté un préavis de dix-huit mois ».

Dès lors, peu importe que la relation commerciale ait duré trente ans ou plus, le préavis à respecter est désormais plafonné à dix-huit mois. En outre, c’est sur cette même durée maximum que se baseront les juges en cas de litige pour fixer l’indemnité à octroyer à la partie victime de la rupture brutale, à savoir la prise en compte du chiffre d’affaires qu’aurait réalisé cette dernière avec son partenaire commercial pendant ledit préavis s’il avait été respecté.

Fabienne Darbin-Lange

Avocat au barreau de Toulouse

Loi EGALIM et la vente des produits phytosanitaires

La Loi EGALIM – loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous – a été promulguée le 30 octobre 2018.

Au nom de la protection de l’environnement et de la préservation de la santé, la sortie d’une agriculture « glypho-sulfatée » pour se diriger vers une agriculture vertueuse constitue l’un des leitmotiv de la loi EGALIM.

Le chapitre III du titre II de la loi relatif au « Renforcement des exigences pour une alimentation durable accessible à tous » prévoit un certain nombre de dispositions dont l’objet est essentiellement la réduction de l’utilisation des produits phytosanitaires.

Parmi ces mesures, la vente des produits phytopharmaceutiques fait l’objet de nouvelles règles.

La loi fait un lien direct entre les « gestes commerciaux » des distributeurs et l’utilisation en hausse des produits phytopharmaceutiques par les agriculteurs.

Ainsi, l’article 74 de la loi insère dans le Code rural et de la pêche maritime un article L.253-5-1 qui interdit les remises, rabais, ristournes (« les 3R ») ainsi que la différenciation des conditions générales et particulières de vente, la remise d’unités gratuites et toutes pratiques équivalentes, à l’occasion de la vente de produits phytopharmaceutiques.

Cette interdiction s’applique aux contrats conclus ou renouvelés à partir du 1er janvier 2019.

Le périmètre de cette interdiction ne se limite pas aux pratiques commerciales fondées sur le montant d’achat ou le volume des produits. Sont également concernées les pratiques commerciales qui accompagnent des services non détachables de l’acte d’achat-vente, dans la mesure où ces la contrepartie financière de ces services s’analyse comme une réduction du prix de vente et non comme le prix d’une prestation de services.

L’appréciation du caractère détachable ou non reste assez confuse, compte tenu, notamment, de la grande variété des services offerts par la distribution à ses fournisseurs.

La Cour d’appel a rappelé, dans un arrêt de 2017,  ce qu’il faut entendre par « fausse coopération commerciale » au regard des dispositions de l’article L. 442-6, I, 1° du Code de commerce :

« Cet article prohibe en premier lieu les services indûment facturés de façon distincte comme services de coopération commerciale, alors qu’ils ne constituent pas des services de coopération commerciale et auraient dû être facturés, sous forme de remise ou ristournes, sur les factures des biens échangés. Il interdit également les services de coopération commerciale ne correspondant à aucun service rendu ou dont la rémunération est manifestement disproportionnée par rapport au service effectivement délivré. […]

Les services de coopération commerciale constituent « des actions de nature à stimuler ou à faciliter au bénéfice du fournisseur la revente de ses produits par le distributeur, telles la mise en avant des produits ou la publicité sur les lieux de vente, l’attribution de têtes de gondoles ou d’emplacements privilégiés, ainsi que la promotion publicitaire », ainsi que les a définis la circulaire Dutreil du 16 mai 2003, et la jurisprudence. Le service doit être détachable de l’achat-vente, c’est-à-dire distinct de la fonction naturelle du distributeur. Autrement dit, les prestations qui font partie inhérente de la fonction même de distributeur ne peuvent faire l’objet de facturation distincte au titre de prestations de coopération commerciale.

Il y a donc fausse coopération commerciale notamment lorsque les services rendus par le distributeur à son fournisseur sont, soit inexistants, soit des pratiques normales et habituelles d’un revendeur qui n’ont rien de spécifiques et ne sont pas détachables de l’achat-vente ».

 

Les contrevenants aux dispositions du nouvel article L. 253-5-1 du CRPM sont passibles d’une amende administrative (15.000€ maximum pour une personne physique et 75.000€ pour une personne morale, et peut être doublée en cas de « récidive » dans les 2 ans et assortie d’une astreinte journalière de 1.000€ maximum.

 

 

Concurrence : La procédure de transaction

En cas de pratiques anticoncurrentielles, les entreprises peuvent bénéficier d’une procédure de transaction.

La procédure de transaction, issue de la loi n° 2015-990 du 6.08.2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques (Loi « Macron »), a remplacé la procédure de non-contestation des griefs.

Cette procédure permet aux entreprises qui renoncent à contester les griefs notifiés par les services d’instruction de l’Autorité de la concurrence de se voir proposer par le rapporteur général de l’Autorité une transaction fixant le montant maximal et minimal de la sanction encourue (et non plus un pourcentage de réduction de sanction comme ce fût le cas dans la procédure de non-contestation des griefs).

Les entreprises peuvent, en outre, s’engager à modifier leur comportement pour l’avenir. Le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction. Trois types d’engagements peuvent être distingués : les engagements structurels (séparation comptable, filialisation, etc.),  les engagements  comportementaux (modifications de clauses contractuelles, de conditions générales de vente ou de grilles tarifaires, etc.), ou les engagements de conformité.

L’Autorité de la concurrence a précisé les conditions de mise en œuvre de cette procédure dans un Communiqué de procédure publié le 21.12.2018.

Le cabinet Fabienne DARBIN-LANGE vous assiste dans la mise en œuvre de cette procédure et la mise en place des engagements notamment comportementaux et/ou de conformité.

 

Manquement contractuel et rupture brutale de relations commerciales établies

Dans un arrêt d’octobre 2018, la Cour de cassation a validé le cumul de l’action en responsabilité contractuelle (pour manquement à une obligation contractuelle) avec l’action pour rupture brutale d’une relation commerciale établie, fondée sur l’article L 442-6,I-5° du Code de commerce.

La Haute Juridiction ouvre ainsi la voie à ce que de nombreuses et prochaines assignations pour manquement contractuel s’accompagnent d’une demande de réparation pour rupture brutale des relations commerciales établies.

Cour de Cass. Chbre com.   Arrêt du 24.10.2018 – n° 17-25672

 

 

Vœux 2019

Maître Fabienne DARBIN-LANGE,

avocat et médiateur auprès de la Cour d’Appel de Toulouse

vous souhaite de bonnes fêtes de fin d’année

et vous présente, ainsi qu’à ceux qui vous sont chers,

ses vœux les plus chaleureux pour la nouvelle année

Dénigrement d’une société: diffamation ou concurrence déloyale?

  •  Le dénigrement commercial et la diffamation sont deux infractions similaires et sont souvent confondues, pour autant elles diffèrent l’une de l’autre au regard de leurs éléments.

La diffamation est définie par la loi sur la liberté de la presse de 1881 comme étant « l’allégation ou l’imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne à laquelle le fait est imputé ».

Le dénigrement est une pratique de concurrence déloyale sanctionnée par le Code civil. Il consiste pour un salarié, un associé ou un concurrent à jeter le discrédit sur l’entreprise ou un autre concurrent, en répandant à son propos ou à celui de ses produits ou services, des informations malveillantes. Il n’y a pas de réelle définition de ces agissements étant donné qu’ils ont été dégagés par la jurisprudence.

Si le dénigrement peut être seulement le fait d’un concurrent ou d’un salarié, la diffamation peut être le fait de toute personne.

  • Intérêt de la distinction

La distinction est essentielle car selon que l’infraction est qualifiée de diffamation ou de concurrence déloyale les délais de prescription ne sont pas les mêmes.

En effet, le dénigrement commercial étant un comportement constitutif de concurrence déloyale, il est sanctionné par les dispositions du Code civil et la prescription s’y rattachant est donc de 5 ans.

En revanche, s’agissant de la diffamation, la prescription est seulement de trois mois . Ce court délai est justifié par le fait que la liberté d’expression doit être favorisée.

  • Arrêt de la Cour de cassation du 26 septembre 2018

La Cour de cassation vient, dans un arrêt récent du 26 septembre 2018, apporter des précisions quant aux différences entre les deux infractions.

Ainsi, la Cour de cassation précise que des propos critiques sur une société publiés dans un article de presse relèvent de la diffamation et non de la concurrence déloyale par dénigrement dès lors qu’ils visent la personne morale elle-même et non ses services ou ses produits.

Cass.com 26.09.2018 n° 17-15.502

Protection des affaires: Nouveau régime applicable depuis le 1.08.2018

La loi n° 2018-670 du 30.07.2018 – applicable depuis le 1.08.2018 – sur la protection du secret des affaires  :

  • définit, d’une part, le secret des affaires et les comportements qui y portent atteinte et,
  • vise, d’autre part, à faciliter les actions judiciaires pour le protéger et s’assurer qu’il ne sera pas divulgué à cette occasion.

Un décret précisant les modalités d’application de ce nouveau régime de protection du secret des affaires doit paraitre prochainement.

Les Modes Alternatifs de Règlement des Différends (MARD)

Différents modes alternatifs de règlement des conflits existent et sont applicables selon les types de litiges et en fonction de la capacité ou la volonté des parties de mettre fin de façon amiable et pérenne à leur différend.

  • La médiation: Processus volontaire et confidentiel de règlement des litiges par les parties, avec l’assistance d’ un tiers neutre.

Le médiateur est ce tiers neutre, indépendant et impartial. Il ne prend parti ni pour l’une ni pour l’autre des parties.

Il n’intervient ni en tant que conseiller juridique, ni en tant que juge ou conciliateur, ni en tant qu’arbitre.

Formé spécifiquement à cet effet, le médiateur mettra tout en œuvre pour rétablir le dialogue entre les parties, en menant avec elles des entretiens constructifs, dans le but de les aider à parvenir à un accord satisfaisant pour chacune d’elles, le tout dans un cadre confidentiel, de transparence et de respect mutuel.

Les parties ont un rôle très actif dans ce processus. Aidées par le médiateur, elles seront amenées à définir par elles-mêmes les modalités de résolution amiable de leur litige, dans le respect de l’ordre public.

L’accord trouvé en médiateur peut être homologué par le juge, pour lui donner force exécutoire.

La médiation implique l’absence de procédure judiciaire (médiation conventionnelle) ou la suspension de celle-ci, durant le processus (médiation judiciaire).

  • Le droit collaboratif: Travail en équipe de négociation volontaire et confidentiel, encadré par un contrat, signé par les parties et leurs avocats respectifs formés au droit collaboratif.

Au terme de ce contrat, les parties et leurs avocats s’engagent à négocier en toute transparence et en toute bonne foi, avant toute saisine judiciaire, selon un procédé  couvert par une confidentialité renforcée et des techniques  de négociation raisonnée, d’écoute active et de reformulation.

La négociation dans le processus de droit collaboratif se déroule en plusieurs étapes, prédéfinies dans le contrat, les avocats signataires ayant le rôle d’encadrer les étapes de la négociation.

La négociation consiste à trouver en transparence et de bonne foi une solution dégagée par les parties à l’aide de leurs avocats respectifs, lors de rencontre de règlements à quatre, qui soit acceptable pour les deux parties et pérenne.

Les avocats formés au processus travaillent avec les parties sur leurs priorités et recherchent avec eux les options qui seraient acceptables pour l’une et l’autre des parties.

L’accord peut être homologué par le juge.

En cas d’échec du processus collaboratif, les avocats ont l’obligation de se retirer de la défense de leurs clients au contentieux

  • La conciliation : Intervention d’un tiers qui propose une solution de règlement.

Le conciliateur prend connaissance du dossier, des points de vue des parties et propose une solution de règlement du différend.

les parties ne prennent pas part à la solution du litige, qu’elles peuvent accepter ou refuser.